La cuisine du cardon est généralement associée aux fêtes de fin d’année. Le légume occupe dans la tradition, en région lyonnaise, en Savoie, et en Provence, une place de choix au réveillon. Dans le sud il est indispensable au repas maigre qui précède la messe de Noël. Il faut dire qu’il se cultive jusque tard dans l’année. D’aucuns ajoutent que ses épines évoquent la Sainte Couronne.
Et il a le bon goût d’avoir un taux élevé de cynarine, qui booste le foie, ce qui n’est pas du luxe en fin d’année. Enfin et surtout, l’attention qu’il requiert le prédestine aux moments exceptionnels.
Ainsi que le rappelle la cuisinière et autrice Sonia Ezgulian : « le cardon demande du temps, c’est donc un véritable cadeau fait à ceux qui le dégustent ».
Le cardon c’est d’abord du temps passé au champ. La maison Héritier le sème en mai, à partir de ses propres graines, dans les plaines d’alluvions des bords de Saône. Quatre mois plus tard il fait déjà 1m50. C’est à ce moment qu’il faut l’emmitoufler, non pour le réchauffer, mais pour l’attendrir. Car l’obscurité, va provoquer son blanchissement : le cardon sera moelleux, point trop amer, il sera cardon (car non-blanc il porte mal son nom).
Originellement, dans le Piémont par exemple, on courbait ses tiges afin de l’enterrer (c’est ce qui lui aurait donné là-bas le nom de “Gobbo”).
Pour le garder droit, il faut le butter, l’attacher à un piquet, puis l’enrober dans une gaine sombre. Par le passé on utilisa pour cela les balles vides issues de l’industrie de la soie. Plongé dans l’obscurité le cardon blanchit, mais il grandit encore, et il faut réitérer l’opération : la famille Héritier attache et ensache ainsi 45 000 pieds chaque automne.
Après arrachage, il faut encore habiller la plante. La parer, pour ne garder que le coeur et les côtes blanches.
Puis en cuisine il faudra l’effiler, bien que la variété lyonnaise, que cultive la famille Héritier, est relativement dépourvue de grosses fibres. Enfin précuire à l’eau ses cotes bien blanches, celles qui définissent un cardon lyonnais de qualité.
Parce qu’il est dommage de réserver un si beau légume au repas de Noël, et parce que les modes de vie contemporain nous empêchent bien souvent de lui consacrer tant d’attention, la maison Héritier use de son savoir-faire pour effectuer tout ou partie de ce labeur. Ainsi aux chefs de cuisine elle propose des cardons biologiques déjà parés. Et à nous tous, des cardons “au naturel”, déjà coupés, blanchis et en conserve. Mais encore des cardons cuisinés, à la délicieuse crème de Bresse, ou encore en velouté.